La DépêcheMOT DE LA PRÉSIDENTE

La liberté de la presse permet aux citoyens de participer au processus démocratique. Mais sont-ils informés ?

La liberté de la presse et la démocratie vont de pair.

La Charte canadienne des droits et libertés protège la liberté de la presse. C’est parce que la liberté de la presse assure aux citoyens canadiens d’être bien informés et d’avoir les outils nécessaires pour être en mesure de participer au processus démocratique.

Mais est-ce qu’ils sont bien informés?

En 2024, plus de la moitié de la population mondiale se rendra aux urnes dans 64 pays, en plus de l’Union européenne.

Malheureusement, la qualité de l’information que ces personnes consomment connait un déclin constant. Il existe des déserts médiatiques partout au Canada.

Selon Reporters sans frontières, l’hyper truquage (deep fake) est désormais l’un des principaux facteurs influençant le déroulement des élections. Les gouvernements étrangers (particulièrement la Chine) et d’autres acteurs étatiques malveillants polluent l’écosystème médiatique en désinformation.

L’IA a conféré aux acteurs malveillants la capacité sans précédent d’altérer du contenu afin de nuire à ceux qui pratiquent le journalisme responsable. Tout cela affaiblit le journalisme lui-même, en l’empêchant de jouer pleinement son rôle d’obliger les gouvernements à rendre des comptes aux citoyens.

Personne ne sait cela mieux que Margaret Sullivan, chroniqueuse américaine au journal britannique The Guardian, qui était la conférencière principale du déjeuner de remise des prix de Liberté de la presse Canada cette année.

Comme Mme Sullivan l’a mentionné dans son livre Ghosting the News, jusqu’à récemment, la ville de Brampton, en Ontario, n’avait ni station radiophonique locale, ni chaine de télévision locale, ni journal local, ni aucun média sérieux en ligne.

Alors qu’elle travaillait pour un petit magazine en ligne à but non lucratif à Toronto, la lauréate de notre prix de la liberté de presse de 2022, Fatima Syed, s’est rendue dans cette communauté d’immigrants et de travailleurs essentiels où le taux de tests positifs à la COVID-19 représentait plus du double de celui enregistré dans le reste de la province.

Grâce à ses reportages dans ce désert médiatique, elle a découvert que le système de santé avait échoué à aider les gens qui en avaient le plus besoin. Les articles de Mme Syed ont été repris par les grands quotidiens et, peu de temps après, la province a envoyé quantité de ressources pour remédier à la situation.

Une presse libre est essentielle au bon fonctionnement de la démocratie, dont elle est le chien de garde. Elle informe le public, facilite les débats publics, donne une voix aux minorités et milite en faveur de la transparence et de la prise de responsabilité chaque fois que c’est nécessaire.

Actuellement, beaucoup de médias et de diffuseurs connaissent des difficultés. Metroland Media Group, l’un des plus grand média d’information au pays, s’est placé sous la protection de la Loi sur les faillites en 2023. Quelque 650 personnes ont été mises à pied et le groupe a mis fin à la publication de ses journaux hebdomadaires communautaires en Ontario. CTV a récemment supprimé une centaine d’emplois et vendu 45 stations radiophoniques régionales. Le Groupe TVA a supprimé 547 emplois, soit 31 % de son effectif. Et pendant la pandémie, Global News a aussi dû procéder à de nombreuses mises à pied.

Tout cela est de très mauvais augure pour la démocratie.

Alors que l’autoritarisme s’implante avec une intensité effrayante, nous devons rappeler aux gens que les médias sont des chiens de garde, pas des chiens de poche.

En les soutenant, vous soutenez la liberté de la presse et la démocratie.

Nous souhaitons à nos amis d’Europe des élections équitables au Parlement européen le mois prochain.

Et maintenant… nous retenons notre souffle en attendant les résultats de l’élection présidentielle américaine en novembre.

 

 

Heather Bakken, Présidente

Comité canadien pour la liberté de la presse